Sous le pontificat de Léon III, à partir de 725, une
crise a touché l'Eglise ,qui remit en cause, pendant plus d'un
siècle, le culte des images en le soupçonnant violemment
d'idolâtrie. Les iconoclastes, se fondant sur l'interdit biblique
et sur une réminiscence du mépris hellénique
de l'image, estiment que la contemplation non médiatisée
par une image est le seul culte en vérité et en esprit
possible - à la différence de tout autre culte
tourné vers la matière morte et inanimée. L'infidélité
de la représentation est en ce sens proportionnelle à
l'infidélité du croyant. Une inadéquation, proprement
insoutenable pour l'art sacré, se creuse entre la grandeur
du modèle divin (le prototype) et la bassesse des moyens de
représentation. Le concile de Nicée II s'est chargé
de rétablir avec fermeté l'orthodoxie du dogme. Son
principal argument consiste à expliquer avec davantage de clarté
le mystère de l'Incarnation. Le Christ s'est fait homme, il
peut être circonscrit dans la chair qui, si corruptible et si
mortelle soit-elle, n'en reste pas moins un mode d'être possible
du divin : Théodore Studite nous dit qu'à travers le
Christ, « l'invisible se fait voir ». Le conflit est né
en réalité d'un malentendu sur le statut -même
de l'image : pour l'iconoclaste, l'image n'est que signe ; il
refuse intégralement la similitude relative propre au symbole
; en revanche, l'iconophile a parfaitement compris que là où
le signe relève de l'écriture pour synthétiser
ce qu'il signifie, le symbole relève de l'imaginaire, renvoie
à ce qu'il désigne, et ouvre sur l'infini des possibilités
de l'image.
D'une manière plus générale, la crise iconoclaste,
mouvement réactif et intégriste contre l'image, se rejoue
à d'autres époques : notamment pendant la Réforme,
véritable tournant dans l'histoire de la représentation.
Pour Calvin et Zwingli, figurer le divin revient à retomber
dans le paganisme. Ils entendent bien restituer au christianisme le
statut de « pure religion de la parole ». Dès lors
le rapport de force entre la parole d'une part et les images et les
rites d'autre part s'inverse ; ainsi s'opère une dissociation
entre la religion et la peinture, qui favorise, en Hollande notamment,
une émergence de la peinture profane (nature
morte et paysage) et un abandon des grands genres (peinture historique,
et religieuse).
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